La Chine va bientôt produire des êtres humains génétiquement modifiés ?
Le site The Conversation revient sur les avancées scientifiques de la Chine en ce qui concerne l'édition génétique, et sur la frilosité de l'Occident.
L'être humain génétiquement modifié, ce n'est pas pour demain. En Occident en tout cas. Comme le révèle le site The Conversation, depuis l'année dernière, avec la création de l'outil CRISPR-cas9 d'édition génétique, la science a fait un grand pas en avant dans ce domaine. Seulement, les populations européennes et américaines ne sont pas prêtes pour de telles expériences. En Asie, en revanche, la Chine et l'Inde ne sont pas totalement opposées à l'idée de créer des surhommes.
La peur de l'eugénisme
Les études citées par The Conversation permettent ainsi de constater la méfiance de l'opinion publique concernant ces technologies, et ce, malgré le progrès constant de notre environnement scientifique. D'après le sondage de Pew Study, par exemple, 68 % de la population américaine serait inquiète à l'idée de modifier les gènes des foetus pour épargner certaines maladies au nourrisson. Et l'intervention scientifique pour rendre les enfants plus intelligents ou plus beaux est encore moins soutenue par la population occidentale, qui redoute les erreurs et les dérives éthiques de l'eugénisme.
Cependant, en Asie, les avis sont moins tranchés. Si ces pratiques sont tout aussi décriées au Japon qu'en Europe ou aux États-Unis, la Chine et l'Inde sont plus ouvertes au débat, notamment en ce qui concerne la question de l'éradication des maladies. Cette divergence pourrait faire de ces deux pays les leaders en matière d'eugénisme et de modification génétique, voire de traitement du cancer.
Le rôle primordial des autorités pour la recherche
En effet, The Conversation rappelle que « grâce au financement du gouvernement chinois, la Chine a été le premier pays à éditer les gènes d'embryons humains en utilisant l'outil CRISPR-cas9 en 2015. La Chine a aussi ouvert la voie aux modifications génétiques non-germinales des cellules du tissu humain dans le cadre de traitements de patients atteints de cancers ». Dans le même temps, aux États-Unis, l'édition génétique n'est pas clairement interdite, mais aucun fonds fédéral ne peut financer de telles recherches, ce qui ralentit considérablement - voire empêche - les travaux des chercheurs américains.
« Il y a deux facteurs primordiaux qui contribuent à l'émergence de technologie d'amélioration génétique », explique The Conversation. « La recherche pour les développer et le soutien de l'opinion publique pour les déployer. Sur ces deux points, l'Occident est loin derrière la Chine. » D'autant que contrairement aux démocraties occidentales, la Chine est moins à l'écoute de l'opinion publique. « Les dirigeants peuvent donc jouer un rôle majeur en façonnant l'opinion publique afin de l'aligner sur les priorités du gouvernement. » Enfin, même si les Nations unies intervenaient pour réguler l'amélioration génétique, cela ne freinerait pas la Chine qui « a déjà prouvé qu'elle était prête à rejeter les normes internationales pour promouvoir ses propres intérêts ».
« Même des augmentations marginales pourraient avoir des effets significatifs »
Les avantages qu'aurait l'empire du Milieu à mener une telle politique ne sont que des spéculations pour le moment, mais il ne faut pas les négliger. En effet, « si on met de côté les objections éthiques et sanitaires, l'amélioration génétique a le potentiel d'apporter d'importants avantages nationaux », d'après The Conversation. « Même des augmentations marginales via l'édition de gênes pourraient avoir des effets significatifs sur la croissance économique d'un pays. Certains gènes pourraient donner à quelques athlètes un avantage dans des compétitions internationales intenses. D'autres gènes pourraient avoir un effet sur les tendances violentes, en suggérant que les modifications génétiques puissent réduire le taux de crimes. »
Voilà pourquoi le site scientifique estime que, dans sa course pour devenir la première puissance mondiale, la Chine pourrait mener une grande politique scientifique en faveur de l'édition génétique. Et rien ne pourrait l'arrêter, pas même les considérations éthiques de l'Occident : « Compte tenu du bilan de la Chine en matière de droits de l'homme dans d'autres domaines, on peut se demander si la pression internationale aurait beaucoup d'effet », conclut The Conversation.